J’y étais, alors je m’en souviens

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ATELIER 2 – J’Y ÉTAIS, ALORS JE M’EN SOUVIENS

Une collection de 6 lettres filmées

Les images du pays que j’ai quitté enfant, constituent aujourd’hui une partie de ma mémoire, comme un espace en moi-même. Ma famille arrivée en France, plus aucun film super 8mm n’a été tourné. La seule image qui reste, est celle d’une tour Eiffel que je pouvais voir de chez mes parents et qui avec le temps s’est effacée pour ne laisser apparaître qu’une brûlure.

Savoir que j’ai accès à ces images, me permet de vivre – là où je suis – maintenant. Celles que je choisis de fabriquer depuis, deviennent peu à peu le prolongement de ma mémoire au travail.

Nous avançons chacun  avec cette somme de traces visuelles, d’odeurs, de mots et de sons, mais certains d’entre nous ont le sentiment d’être Nulle-Part. Pour eux, l’exil n’est pas uniquement une question géographique; devenus peu à peu étrangers à leurs souvenirs, ils habitent en dehors d’eux-mêmes. Pourtant, quelle que soit leur réalité, lorsqu’ils se retrouvent ainsi à la frontière,  ils nous parlent toujours d’un chemin et d’une histoire singulière qui nous renvoient à nous-même et à la société dans laquelle nous vivons.

Ne plus se souvenir, perdre une partie de sa mémoire est une manière de s’exiler de soi-même.

L’écriture, comme le cinéma sont des moyens de fabriquer des traces.

Mené au sein de l’Association Le Grand Platane de Perpignan, l’objectif de l’Atelier que j’ai développé a été d’ouvrir un espace différent à des personnes malades d’Alzheimer pour leur permettre à partir de la formulation de souvenirs, mis en mots et en images, d’avoir accès à un nouvel espace à investir – comme un nouveau pays à habiter.

Cet atelier a permis l’élaboration de 9 lettres manuscrites et de 6 lettres filmées.

Chacune d’entre elles est l’aboutissement d’une année de travail, elles se sont écrites strate par strate avec parfois un début de phrase en commun, parfois une image. Dans tous les cas, il a été demandé à chacun, de dire qui il est, à qui il souhaite s’adresser et de noter chaque fois ce qui lui passait par la tête.

Beaucoup d’hésitations, de doutes, de peurs ont été formulés.

Pour certains, cela a donné lieu à l’énonciation d’un unique souvenir en boucle, qui s’est précisé au fil du temps. Pour d’autres, chaque souvenir en  a appelé un autre et a permis une continuité. Parfois ils y évoquent la maladie, l’âge ou le temps qui passe… Tous sont retournés vers le lieu de leur enfance.

Tous se sont étonnés de se souvenir « qu’ils y étaient » et qu’ils y sont encore.

La page blanche a été comme une porte à franchir…

A travers leurs récits, marqués par les troubles de la maladie, ces lettres dessinent le portrait sensible d’une génération de femmes et d’hommes inscrits dans la géographie et l’Histoire d’un territoire  situé lui-même à la frontière.

*Présentation du projet au colloque : « Récit de soi, Mémoire et identité » Paris – Univ. la Sorbone – 2015.

http://colloquerecitdesoimemoireidentite.com/

**Exposition-installation à la Maison de la Catalanité, à Perpignan, en mai-juin 2016. Édition d’un livre-DVD avec la collaboration du peintre Patrick Loste – VOIX Éd. / Richard Meier

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ROGER

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